Les Iconoclasses à la galerie Marcel Duchamp

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Depuis 17 ans, la Galerie Duchamp développe un projet de résidences d’artistes en milieu scolaire baptisé Les Iconoclasses. A partir du mois de janvier 2015, neuf écoles de la région d’Yvetot ont accueilli des artistes, qui ont développé un projet de création personnelle en lien avec les classes partenaires. Les projets de ces artistes ont été exposés dans les écoles participantes en mai/juin. Vous les retrouvez à la Galerie Duchamp pour l’exposition de la rentrée. Artistes participants : Alice Cabrillac / Fabien Delisle / Mathieu Doueznel / Alban Gervais / Fleur Helluin / Akira Inumaru / Anaïs Lelièvre / Hélène Neraud / Renaud Porte.

Photo de Myriam Chaïeb Nairi
Photo de Myriam Chaïeb Nairi

Le mouvement d’éducation populaire a toujours été une préoccupation au sein de mon art. Que je sois dans un contexte performatif, ou celui de la fabrication plastique, la question du public est une permanence. Non seulement pour celle de la perception de mon travail, mais au sens social et politique de ce que l’artiste doit provoquer au sein d’une communauté. Sans oublier le désir farouche de ces anciens résistants, ayant compris avec violence toute l’importance d’une société éduquée et cultivée. Alors le travail de la Galerie Marcel Duchamp à Yvetot, avec ses Iconoclasses, ne pouvait que résonner en moi et bien plus encore. D’autant plus que cette part de recherche portée par cette galerie, s’inventait directement en milieu scolaire. Pour moi, ce fût à l’école de Mannevillette, dans laquelle une ancienne classe devint mon atelier. J’y ai revêtu des couvertures de goudron, étalé des tas d’anthracite, écrit le long texte de Moyd, dessiné des dizaines de calligraphies également goudronnées, modélisé des images numériques, fabriqué des sténopés, et peut-être et surtout, j’ai discuté avec les enfants et les institutrices sur le processus du geste créatif. Sans oublié que j’ai joué au football, et que ce n’est pas la moindre des activités. Enfin ces instants de vie ont certainement influencé mon langage de création, car je venais aussi pour cela : une perméabilité à un autre milieu que le contexte habituel des ateliers. Il est en fait que l’on m’oppose de plus en plus souvent, la contemporanéité d’une démarche aux « gens simples » (sic). Comme si la pensée ou l’autorisation de penser, avait son seuil, et que les castes des uns n’étaient pas les autres. Je me suis donc réjouis des remarques des enfants lors de leurs visites tant organisées qu’informelles, qui me rappelaient que ma présence n’avait rien d’incongrue, au même titre que les dames de service, les enseignantes, ou la gelée du matin sur le banc. Enfin, je dos réitérer toute ma reconnaissance d’avoir vécu une telle expérience auprès de toutes les personnes de l’école de Mannevillette, mais aussi de rendre grâce à cette initiative des Iconoclasses, qui reste, une véritable réponse à une société qui se veut en devenir.

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MOYD à la Galerie Marcel Duchamp

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MOYD

Le Ritmea Pulvis Praxis est le plus petit organisme vivant de l’ordre nominal. Son statut unique d’ignorance de toute autre espèce le rend impossible à voir, sinon d’entendre son existence par un système extrêmement élaboré de pression sonore. La transcription est faite à ce jour par l’unique manuscrit de son langage intitulé Moyd. Effectivement, on lui impute toute la dimension rythmique des paysages, et cette traduction est une langue, un système de césures, des goulets et des passages, des ravines et des étranglements, qui rendent les interstices de silence nécessaires à toute musique. Sa discrétion impose des dispositions techniques d’une ampleur sans égale quant à l’imagination. Même si le sens n’a pas encore été élucidé, la complexité du propos donne à penser qu’il s’agit là d’un rapport tridimensionnel au langage. La profondeur de champ des mots du Ritmea Pulvis Praxis est présentée ici dans sa forme originelle, dans son rendu rédactionnel et sismique. Le lien subsistant tout au long du « récit » n’est qu’un bourdon, une sorte d’écoulement tonal perçu en rouge, aux variations géologiques à consonance unique. Il est à penser que les longues phases migratoires du Ritmea Pulvis Praxis, porté par le vent, aient essaimé dans plusieurs contrées. Il semblerait que des milliards d’autres propositions puissent être envisagées sur des tonalités différentes, et que ce chemin de transhumance soit la véritable ligne centrale des codes d’écriture.






 

A3

 

A3 est une sorte de raréfaction d’espace et de mots, une territorialisation de l’âme à l’endroit où l’on veut la confiner pour que le jeu persiste sans plus de perversion d’intention, ni d’effet à la confirmation théâtrale, juste le corps de l’être et sa reconnaissance à son animalité. Gestes simples et râles pour voix, un crâne en réceptacle des mémoires crayonnent l’esquisse dans la lumière, dessinent le peu en tas d’os, de muscles et de chair jusqu’à former une nature d’homme. L’histoire est là, dans ce que l’on veut y voir, l’invisible se calquant jusqu’à l’apparition en masse, jusqu’à l’épaisseur transparente distordant une réalité par retour des échos.

 

Performance:  Fabien Delisle

Composition sonore: Hologram_

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Fanfan Mattei (Figure du possible)

Fanfan Mattei (Figure du possible)

La figure du berger, du Corse ou bien encore de l’homme m’échappe suffisamment pour n’avoir aucune image en tête. Après la réalisation de ce film, je crois que je suis encore à cet état d’ignorance pour regarder avec surprise la personne de Fanfan Mattei. Depuis sa mort, la même année du tournage, je me demande si je n’ai pas fatigué un peu plus son petit cœur pour qu’il lâche à cet instant de fabrication. Mais c’est une donnée des vivants que de penser aux morts, de leur conférer mille attributions extraordinaires et de passer au registre des regrets de n’avoir acter plus tôt, telle ou telle parole. Les paroles en l’air j’aime cela, parce que si elles ont un certain poids elles retomberont un jour ou l’autre. Fanfan ramassait ces mots là dans des poèmes ou des pensées contractées durant sa vie solitaire. Depuis sa première diffusion ce film continue d’être regardé dans des salles modestes, dans des lieux champêtres, en Corse, sur le continent. Il attise la conversation, l’émotion, et je crois que je conçois un film comme on s’assoit devant une cheminée. A chacun d’avoir vu la flammèche insoupçonnée et d’échanger avec les autres les impressions partagées. Oui c’est comme cela que je conçois un film.

Durée: 46 minutes

Diffusion: Faculté de Corte 26-28 Mars 2013